La Bébé Peugeot, licence Bugatti

Copyright Laurent Nivalle

L'une des toutes dernières Bugatti de la période historique : un coupé 101

Les Dernières Nouvelles de Strasbourg relatent l'accident mortel de Jean Bugatti.

Trois des plus belles réalisations de Jean (De haut en bas) : Le roadster 55,  Le coupé Atalante et l'Atlantic

Les quatre versions de la Type 57, création de Jean : la berline Galibier, le coupé Atalante,

le coach Ventoux,

le cabriolet Stelvio

La plus célèbre des "Royales", le "Coupé Napoléon", dessinée par Jean Bugatti. Aujourd'hui au

musée de Mulhouse.

Le château Saint Jean dans les années 1920, propriété d'Ettore Bugatti. Aujourd'hui siège de la société Bugatti Automobiles SAS.

Bugatti au volant de sa mythique "35"

La "Brescia" écrit les premières pages de la légende Bugatti

Bugatti et sa première voiture commercialisée sous son nom.

Ettore Bugatti refusé au Paris-Madrid de 1903... pour cause d'engin trop atypique.

Ettore Bugatti à bord de sa première création
Ettore Bugatti
 
 
 
 
 
 
 
 
 

La fin d’une époque

Le 11 août 1939, Jean Bugatti essaie, de nuit sur une Nationale près de Molsheim, le Type 57 qui vient de remporter les 24 Heures du Mans. Excellent conducteur, Jean fait office de pilote d’essai. La route est fermée par des collaborateurs de l’usine, et par son frère cadet, Roland… sauf qu’un cycliste jaillit d’un chemin de traverse. Écart de Jean, à 200 km/h. Sortie de route. Jean est tué sur le coup. Il avait 30 ans. Vingt et un jours plus tard, la Seconde Guerre mondiale éclate… L’entreprise Bugatti ne se remettra jamais de la disparition de Jean et de la Guerre. Ettore meurt en 1947, à l’âge de 66 ans. Il meurt à l'hôpital américain de Neuilly, d'une suite d'une pneumonie.

 

En 1951, le fils cadet d’Ettore, Roland, 25 ans, tente de relancer la Marque avec un collaborateur historique de l’usine, l’ancien pilote Pierre Marco. Ils présentent le Type 101, en berline, coupé et cabriolet. En réalité, c’est un châssis de 57 d’avant-guerre, rhabillé pour l’occasion. Les temps ont changé. Et le génie n’y est pas. Trop chers et techniquement dépassés, seuls six Types 101 et 102 seront vendus. Ultime tentative de Roland Bugatti et de Pierre Marco de faire revivre la Marque, en 1956 : une voiture de Grand Prix, à moteur 8 cylindres transversal à l’arrière, le Type 251. La mécanique est belle, mais la mise au point aléatoire et la tenue de route déplorable. C’est l’échec. En 1956, la Marque est vendue à Hispano-Suiza. L’usine de Molsheim se spécialise dans la fabrication de pièces pour l’aviation.

 

Du vivant d’Ettore et de Jean, environ 8.000 Bugatti ont été construites à Molsheim. 2.000 d’entre elles auraient survécu à travers le monde, dont bon nombre se trouvent aux Etats-Unis. Pourtant, l’histoire ne s’arrête pas là…

 

En 1987, un industriel italien, Romano Artioli, achète la marque, construit une usine ultramoderne prés de Modène (Italie), et fait appel aux meilleurs ingénieurs pour concevoir l’EB 110, une voiture de sport extrême, équipée d’un moteur 12 cylindres de 3,5 litres, à quatre roues motrices (Voir l’historique complet sur

The Bugatti EB110 Registry

). Malgré un accueil international favorable et malgré la qualité de la voiture, « l’aventure Artioli » s’achève en 1997. Un an plus tard, la marque Bugatti est rachetée par le Groupe Volkswagen qui lance la

Veyron

, du nom d’un ancien pilote de la Marque, avec l’ambition de proposer la plus extrême des « supercars ». Avec son moteur 16 cylindres en W de 8 litres, ses 1001 chevaux et dépassant les 400 km/h, la Veyron est la plus performante et la plus chère des voitures actuelles. Même si c’est une autre histoire, des Bugatti sortent à nouveau d’une usine installée à Molsheim.

 

Vive la Marque ! 

Jean

1936 : le Front populaire, la France en grève. L’usine Bugatti occupée. Ettore ne comprend pas ‘l’ingratitude’ de ses ouvriers. Choqué, il se retire à Paris et confie la direction de l’entreprise à son fils Jean, 27 ans. C’est un garçon apprécié, passionné, travailleur et compétent. Dessinateur de génie, on lui doit des chefs d’œuvres de carrosseries tels les Bugatti Royales Coupé Napoléon et roadster Esders, dessinées à 21 ans, les sublimes coupés et cabriolets Type 55, à 22 ans, ou les révolutionnaires Aérolithe et Atlantic aux airs d’avions de chasse… Jean était également un ingénieur : il imposa les moteurs à double arbres à cames en tête et les freins hydrauliques (au lieu des câbles auxquels Ettore restait attaché), mais il dut renoncer aux roues indépendantes sur le Type 57, devant le refus de son père.

 

Alors que l’entreprise est en péril (seule 66 voitures ont été vendues en 1933), Jean pense qu’il faut se concentrer sur un seul modèle, le Type 57, lancé en 1934, en lieu et place des Types 46, 50 et 55 en manque de clients.

 

La « 57 », création de Jean, est une réussite absolue, déclinée en tourisme, sport et course. Avec quatre personnes à bord, elle atteint 180 km/h, à une époque où on roule à 60. Produite de 1934 à 1940, à 685 exemplaires, la « 57 » sera le modèle de la Marque le plus vendu. En version course, elle remportera les 24 heures du Mans 1937 et 1939. Elle permit à la Marque de se redresser. Elle aurait pu la sauver, sans l’accident de Jean.

La Royale

Ami des têtes couronnées et des superlatifs, Ettore voulut construire « La » voiture que plébisciteraient les Grands de ce monde. Ce serait la plus luxueuse, la plus belle, la plus imposante, la plus puissante et forcément la plus chère de tous les temps : le Type 41, sera baptisé « La Royale ».

 

Tout y était démesuré : son moteur huit cylindres en ligne de 12.750 cc. ses roues d’un mètre de diamètre, son châssis de trois tonnes, sa consommation de 40 litres aux 100 kilomètres, sa vitesse (annoncée) de 200 km/h… et son prix (50 fois le prix d’une voiture ordinaire).

 

Bugatti pensait en vendre 25. Il n'en fabriqua que 6 et n’eut que trois clients, dont aucun n’était Roi, ni même célèbre. Ettore fit d’une quatrième « Royale » sa voiture personnelle.

 

« La Royale » faillit couler l’entreprise. In  extremis, en 1932, Ettore limita les dégâts en proposant des autorails équipés de quatre moteurs de Royales. Il en vendit 88 exemplaires, roulant à 172 km/h. Son fils, Jean, établit un record du monde de vitesse, avec 192 km/h. Les autorails Bugatti restèrent en service jusqu’en 1958.

Gloire et prospérité

La « 35 » apporta la gloire à Bugatti. En faisant vendre ses voitures de sports ou de tourisme, elle lui apporte également la prospérité financière : Ettore menait grand train. Château à Molsheim, écuries et chevaux de race, meute de chasse à courre, auberge privée pour accueillir ses clients, villa sur la Côte d’Azur, appartement bourgeois dans le 16ème arrondissement de Paris, table ouverte aux Grands de ce monde, Rois, Princes, Artistes et Industriels… Cet homme-là, inventeur et travailleur infatigable, ne s’arrêtait jamais. Personnage hors du commun, génial, têtu, excentrique, exigeant et colérique, Bugatti incarne une époque où l’amour du beau ne se heurtait à aucune contingence matérielle. Prototype du « Patron » (ainsi le surnommait-on) du début du XXe siècle, paternaliste, il connaissait chacun de ses 1.400 employés, apprenant à ses ouvriers un geste à l’établi, accordant des primes à ceux qui économisaient une part de leur salaire, et imposant à son fils, Jean, de faire ses preuves comme apprenti avant de prétendre monter dans les échelons de l’entreprise familiale…

La « 35 », son Chef d’œuvre

Si, dans les années 1910 à 1920, Bugatti a fabriqué des petites voitures équipées de quatre cylindres, il sera vénéré pour ses 8 cylindres en ligne, aux allures d’œuvres d’art. En 1922, le Type 30 inaugure la série des 8 cylindres. Et en 1924, le summum de son génie s’exprimera avec le Type 35.

 

La « 35 », avec sa ligne sublime et ses performances époustouflantes, est la plus mythique des Bugatti. Elle dominera pendant une dizaine d’années les compétitions nationales et internationales, totalisant 2000 victoires (record inégalé à ce jour). Cinq années de suite, elle remporte la célébrissime Targa Florio sicilienne. Avec cette voiture de Grand Prix, dépassant les 180 km/h, le client peut rouler tous les jours en ville ou sur route… Son tarif ? Huit fois le prix d’une Peugeot ou d’une Citroën populaires ! Construite à seulement 343 exemplaires, la Bugatti 35 demeure le rêve absolu (et inaccessible) du collectionneur… au point que, 90 ans après sa  création, des artisans et des particuliers en fabriquent des copies conformes, tel l’Argentin « Pur sang ».

 

Le châssis de la « 35 » est tellement efficace, sa ligne tellement aboutie et elle provoque un tel engouement, qu’Ettore Bugatti en propose une version plus abordable, équipée d’un moteur 4 cylindres, le « type 37 ».

Naissance d’un mythe

En 1919, au premier Salon de l’Automobile de Paris après la Grande Guerre, Ettore expose ses Types 13, 22 et 23. Durant le conflit, il avait enterré ses moteurs de compétition, pour qu’ils ne soient pas confisqués par les Allemands. Cela lui permet de remporter dès 1920, avec son type 13, la Coupe des voiturettes au Mans: 570 kilomètres à la moyenne de 92 km/h, sur routes non goudronnées. Il s’impose devant des voitures beaucoup plus puissantes. En quelques années, sa « voiturette » de 1.300 cc, à seize soupapes et arbre à came en tête, avec sa tenue de route exceptionnelle, remportera 40 victoires.

 

En 1921, elle recevra le surnom de « Brescia », après avoir raflé les quatre premières place du Grand Prix de Brescia. Ainsi, Bugatti démontre définitivement que le poids n’est pas gage de tenue de route. Il vient d’écrire les premières pages de sa légende.

Constructeur

 

Bugatti ouvre alors un bureau d'études en Alsace et dessine le Type 8, qu’achète la société allemande « Gas Motoren Fabrick Deutz ». Il foisonne d’idées dans tous les secteurs : au cours de sa vie, il déposera un millier de brevets dans tous les domaines. Il concevra même une machine à fabriquer des pâtes ! Confronté au moindre objet, il cherche à l’améliorer.

 

En 1909, Ettore commercialise la première « Bugatti » siglée exclusivement à son nom : le Type 10. Pas très élégante, mais légère - à une époque où les constructeurs ne jurent que par le poids - fiable et véloce. Ettore la surnomme "Pur sang", référence à son amour des chevaux. La dénomination sera désormais associée aux productions de Bugatti.

 

Ettore est également un homme d’affaires : en 1911,  il cède à Peugeot, la licence d’une voiture populaire à deux places, engin minimaliste parfaitement étudié : la Type 12, ou « Bébé Peugeot ». Vendue à plus de 3.000 exemplaires, elle apporta la trésorerie nécessaire au développement de ses voitures de course.

Bugatti a installé ses ateliers à Molsheim, à 20 kilomètres de Strasbourg. 65 ouvriers y fabriquent les Types 13, 15, et 17. Il a lui-même dessiné les plans de l’usine, les outillages et les machines-outils. Il y dispose d’une fonderie.

Ingénieur

 

Impressionné, l’industriel alsacien Eugène de Dietrich embauche Bugatti pour étudier deux voitures de tourisme (les Types 3 et 4) et une voiture de course. Ettore est mineur. C’est son père qui signe le contrat de travail. Bugatti se rend en Alsace au volant de sa Type 2, sans encombres.

 

Une centaine de « Dietrich-Bugatti » sont fabriquées, mais  Bugatti rêve de compétition : Il conçoit une voiture de course pour le Paris-Madrid 1903. L’engin est tellement atypique, avec son conducteur assis au ras de la route, que les commissaires refusent son inscription.

 

En 1904, Ettore et son ami Emile Mathis quittent de Dietrich pour fabriquer leurs propres voitures, les « Mathis Hermes-Licence Bugatti » (Aujourd’hui référencées Types 6 et 7). Deux ans plus tard, Mathis et Bugatti, aux caractères antagonistes, se séparent. Mathis construira des voitures populaires. Bugatti des voitures de course et d’exception. Sa devise : « Rien n’est trop beau, rien n’est trop cher.»

Naissance d’une vocation

 

Né à Milan (Italie) en 1881, Ettore grandit dans une famille d’artistes. Son grand-père, Giovanni Luigi, était sculpteur et son père, Carlo, ébéniste avant-gardiste. Son frère cadet, Rembrandt, devint un grand sculpteur animalier.

 

Ettore voulait lui aussi être sculpteur. Il s’inscrit aux Beaux Arts de Milan, mais il comprend vite qu’en la matière, il n’a pas le génie de son frère. Changement de cap : nous sommes en 1898, les balbutiements de l’automobile. Ettore essaye un tricycle à pétrole, de marque « Prinetti et Stucchi ». C’est la révélation : il n’a que 14 ans, aucune notion de mécanique, mais il démonte le tricycle et propose au constructeur des améliorations techniques pertinentes. Aussitôt, Prinetti & Stuchi l’embauche, pour étudier une voiture, qui ne sera jamais produite.

 

Déçu, Ettore, âgé de 17 ans, décide de construire lui-même sa première voiture (le Type 1), puis une deuxième qu’il présente à l'Exposition Internationale de l'Auto, à Milan en 1901. Atteignant 60 km/h, ce Type 2 reçoit le Premier Prix de l’exposition.

« Bugatti », un nom universellement connu, comme Michel-Ange, Léonard de Vinci, Stradivarius ou Picasso. Pourtant Ettore Bugatti n’était ni peintre, ni sculpteur, ni musicien. Mais, constructeur automobile, il éleva ses créations au rang d’œuvres d’art. Des centaines de livres lui ont été consacrés. Le Club Bugatti France rappelle ici les grandes étapes de sa vie.

Ettore Bugatti

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